
Domaine Arlaud : pour la vie de la vigne
Dans le vignoble de la Côte de Nuits, Cyprien Arlaud exploite environ 15 hectares. Et pour tirer le meilleur de la mosaïque de sols que sont les climats de Bourgogne, il a fait le choix de la biodynamie.
Un terroir unique qui aime la stabilité
En Côte de Nuits, Cyprien Arlaud cultive une approche du vin qui conjugue singularité et collectif. Il exploite, en biodynamie, environ 15 hectares, principalement en pinot noir, et compte aujourd’hui pas moins de 19 appellations. Gevrey-Chambertin, Chambolle-Musigny, Morey-Saint-Denis, Morey-Saint-Denis 1er Cru… des noms qui font rêver… mais qui cachent une gestion extrêmement complexe du Domaine Arlaud. « Pour chaque parcelle, il faut en comprendre les clés. Ce sont des vins issus d’un même cépage mais ils ont chacun un caractère différent car on retrouve l’expression du sol dans le vin », explique-t-il. Il y a 27 ans, en 1998, quand il reprend l’exploitation familiale, elle fonctionne en viticulture conventionnelle. « J’ai vite compris que si je voulais faire du très bon vin, il fallait prendre le plus grand soin de mon outil de travail, à savoir les sols et les plants. Certaines parcelles ont parfois été exploitées depuis 6-700 ans mais, avec le réchauffement climatique, il fallait retrouver une résilience perdue pour mieux résister aux extrêmes du climat de plus en plus fréquents. Une bonne santé des sols est devenue vitale », détaille Cyprien Arlaud.
La difficulté est qu’ici, chaque vignoble est une pièce d’un immense puzzle, où les 1 200 climats de Bourgogne dessinent une mosaïque de sols, d’expositions et de microclimats. Une richesse inestimable, façonnée par des siècles d’observation et de transmission, mais qui impose aussi une responsabilité : celle de préserver un équilibre fragile. « La vigne aime la stabilité, elle aime être taillée par la même main. Et une vigne, sur une espérance de vie de 100 ans environ, atteindra l’apogée de sa qualité vers 60 voire 80 ans. La notion de temps et de pérennité du pied de vigne est très importante », rappelle le vigneron.

Faire face à l’avenir avec pragmatisme
Or, les bouleversements climatiques et les pressions environnementales remettent en cause cet équilibre. Face à ces défis, il prône une viticulture où l’accompagnement prime sur l’interventionnisme, en favorisant les pratiques biodynamiques et une approche plus respectueuse des sols. « Il faut comprendre ce que la nature nous offre, plutôt que vouloir lui imposer un modèle figé », insiste-t-il. Une philosophie qui s’incarne dans une gestion minutieuse de chaque parcelle, où l’observation et l’adaptation deviennent des principes fondamentaux. « Avec le réchauffement climatique, on ne peut plus appliquer les mêmes recettes pendant 40 ans, il faut s‘adapter en permanence. Par exemple, les vendanges doivent maintenant se faire sur une période très courte pendant laquelle il faut donc multiplier par deux ou trois les moyens humains. Il y a aussi une vraie nécessité de planification et d’organisation du travail. »
Mais si chaque terroir est unique, il ne prend pleinement sens qu’au sein d’un ensemble. « Tout est question de valeur relative. Mon vin a de la valeur uniquement par rapport aux autres vins alentour. Nous sommes donc tous liés. Nous devons trouver ensemble les clés, entre vignerons mais aussi avec les scientifiques (comité dédié, université de Dijon, Inrae…) et Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB) », souligne Cyprien Arlaud, insistant sur l’importance du cadre collectif dans lequel évoluent les vignerons bourguignons. Cette interaction permanente entre tradition et innovation fait la force du vignoble bourguignon et garantit sa pérennité.
Laisser la nature nous surprendre
Entre héritage et expérimentation, Cyprien Arlaud inscrit son travail dans une logique où le vin est autant un témoignage du passé qu’une construction pour l’avenir. « Votre vérité ne sera peut-être pas celle de votre voisin et pourtant, vous faites partie d’un tout », résume-t-il, rappelant que chaque bouteille raconte une histoire unique, tout en étant le fruit d’un territoire façonné par des siècles d’efforts communs. « La nature est surprenante. En la laissant faire, on voit déjà que depuis le millésime 2015, qui marque un peu une bascule dans le réchauffement climatique en Bourgogne, les vignes ont commencé à s’adapter avec l’aide de l’accompagnement humain. Mais cela reste un accompagnement. » Une quête d’excellence et d’harmonie qui peut inspirer d’autres territoires viticoles.








