
Mutualisme : Quand l’union fait la force
Des banques mutualistes aux coopératives agricoles, des SCOP aux structures d’intérêt collectif, la France est riche de modèles économiques uniques, qui irriguent aujourd’hui une large part de son économie. Fondé sur la solidarité, la gouvernance démocratique et le partage de la valeur, le mutualisme conjugue performance et utilité sociale. Il a donné naissance à des entreprises profondément ancrées dans leur territoire, capable de catalyser les énergies et de soutenir les initiatives locales.

Un modèle économique fondé sur la solidarité et la démocratie
Le mutualisme et la coopération partagent une même philosophie : entreprendre ensemble pour répondre à des besoins communs. Dans ces entreprises pas comme les autres, les membres – qu’ils soient salariés, clients, producteurs ou usagers – détiennent collectivement le capital et participent aux décisions. Le principe fondateur ? Une personne, une voix.
Pour la fédération Coop FR, à laquelle adhèrent des entreprises comme le Crédit Agricole, ce modèle repose sur trois piliers : une gouvernance démocratique, la participation active des sociétaires et la répartition équitable des excédents. Pas d’actionnaires extérieurs : les bénéfices sont réinvestis pour renforcer les activités, financer de nouveaux projets et soutenir les territoires.
Des racines anciennes et un ancrage solide dans l’économie française
L’histoire du mutualisme et de la coopération remonte au XIXᵉ siècle, quand artisans, ouvriers et agriculteurs ont commencé à s’organiser pour faire face ensemble aux aléas des récoltes et du marché. Ainsi, les sociétés de secours mutuels, les coopératives ouvrières et agricoles ont constitué les premières formes d’économie solidaire.
Deux siècles plus tard, le modèle a prouvé sa pertinence : selon le Panorama 2024 des entreprises coopératives, la France compte aujourd’hui plus de 22 000 structures de ce type. Elles représentent près de 1,3 million de salariés et un chiffre d’affaires cumulé de 381 milliards d’euros. Présentes dans tous les secteurs, elles incarnent une économie où la performance s’allie à la responsabilité collective.

Les banques coopératives : une autre façon de financer l’économie
Dans le secteur bancaire, les groupes coopératifs occupent une place majeure. Dans des institutions comme le Crédit Agricole, une seule logique : leurs clients sont aussi les sociétaires. Autrement dit, ils possèdent des « parts » de l’entreprise ». Ce modèle de gouvernance a démontré sa résilience, notamment pendant la crise sanitaire.
Sa force tient à cette double mission : être des acteurs économiques performants et des partenaires de la société. Dans la région, le Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne illustre parfaitement cette dynamique, en soutenant de nombreuses initiatives locales et en accompagnant des projets portés par des coopératives ou des entreprises de l’économie sociale et solidaire.
C’est quoi, une banque mutualiste ?
Les coopératives agricoles : mutualiser pour mieux produire
Le monde agricole a, lui aussi, fait du modèle coopératif un pilier de son organisation. Dès le début du XXᵉ siècle, les agriculteurs ont compris l’intérêt de se regrouper pour peser dans la chaîne de valeur. Aujourd’hui, les coopératives agricoles – de la filière céréalière au vin, en passant par la transformation et la commercialisation – représentent une part essentielle de la production agroalimentaire française. Cette réussite a une explication simple : son efficacité. Mutualiser les outils de production, la recherche, la transformation ou la commercialisation… tout cela permet de garantir un revenu plus stable et un meilleur pouvoir de négociation aux producteurs. Au-delà de la performance économique, ces structures défendent des valeurs fortes : ancrage territorial, développement durable, transparence et équité.

Des coopératives dans tous les secteurs
En Côte-d’Or, par exemple, la Coopérative Laitière de Côte-d’Or à Lucenay-le-Duc perpétue cette tradition de solidarité entre éleveurs en collectant et valorisant le lait produit localement. Dans l’Aube, la Société Coopérative Agricole de la Région d’Arcis-sur-Aube (SCARA) regroupe plusieurs centaines d’agriculteurs céréaliers et incarne cette logique d’entraide : mutualiser les outils, investir ensemble et peser davantage sur les marchés. Plus au nord, en Haute-Marne, la Coop Viandes de Haute-Marne, fondée en 2021 à Chaumont, illustre le renouveau du modèle coopératif : cette société d’intérêt collectif réunit éleveurs, collectivités et consommateurs autour d’une filière locale de transformation et de commercialisation de la viande.
Dans l’Yonne, le mouvement coopératif s’exprime aussi dans la viticulture. La Chablisienne, à Chablis, rassemble plus de 250 viticulteurs et produit une part importante des vins de l’appellation. Elle démontre que la coopération peut rimer avec excellence et rayonnement international, tout en garantissant un ancrage territorial fort.
La coopération s’étend aujourd’hui à tous les domaines : logement, commerce, culture, énergies renouvelables, services à la personne ou numérique. Les SCOP (sociétés coopératives de production), détenues par leurs salariés, et les SCIC (sociétés coopératives d’intérêt collectif), ouvertes à des partenaires publics ou privés, incarnent cette nouvelle génération d’entreprises où le projet social s’allie à la rentabilité économique. Dans l’Aube, la CASAY – Coopérative Agricole des Serristes de l’Aube et de l’Yonne – illustre cette diversité. Spécialisée dans la filière fruits et légumes, elle associe producteurs, transformateurs et distributeurs dans une même logique de partage de la valeur et de développement local. Ensemble, ces structures démontrent qu’il est possible d’entreprendre autrement, sans renoncer à l’efficacité.

Les Semaines du Sociétariat, c’est quoi ?
Chaque année, le Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne met en avant les initiatives et les impacts concrets de ses sociétaires sur le territoire. Cette année, du 17 au 29 novembre, tout le territoire de Champagne-Bourgogne se mobilise pour organiser des marchés mutualistes, collectes et marches solidaires, ateliers du numérique, conférences sociétales, etc.
Tout le programme est à retrouver, département par département, dans ce dossier Grand Format sur le mutualisme.
Un modèle porteur pour les territoires
Ce qui distingue fondamentalement les entreprises coopératives et mutualistes, c’est leur ancrage territorial. En effet, les structures que l’on vient de citer ont toutes un impact local direct : elles créent de l’emploi, soutiennent des filières, renforcent la cohésion des territoires et participent à la dynamique économique des zones rurales.
Le modèle coopératif s’impose aussi comme un acteur clé des transitions. De nombreuses coopératives innovent pour répondre aux défis climatiques et sociaux. En favorisant la participation citoyenne et la relocalisation des activités, elles contribuent à construire une économie plus sobre et plus équitable.
Les bénéfices du mutualisme sont multiples : meilleure redistribution de la valeur, implication des sociétaires dans les décisions, gouvernance partagée et utilité sociale directe. Pour les membres, c’est un moyen d’être à la fois consommateur, acteur et citoyen. Pour la société, c’est une voie vers un développement plus équilibré.
Préserver les valeurs, relever les défis
Reste un enjeu majeur : comment conserver les principes fondateurs du mutualisme et de la coopération dans un monde économique en mutation ? L’agrandissement de certaines structures, la complexité des marchés financiers et la transformation numérique peuvent fragiliser le lien direct avec les sociétaires.
Le défi est donc de rester fidèle à la gouvernance démocratique tout en innovant. À l’heure où les citoyens cherchent du sens et de la transparence, le mutualisme et la coopération apparaissent plus que jamais comme des réponses concrètes à une économie à taille humaine. Alors, quelle que soit la taille de l’entreprise mutualiste, elle doit entretenir et valoriser celles et ceux qui s’investissent. Rappelez l’importance du lien humain, favoriser les rencontres et les échanges, donner une voix et les moyens d’avoir un impact direct sur son territoire, sont autant de leviers qui permettent de rappeler l’importance des sociétaires et des administrateurs dans une entreprise mutualiste. Car sans eux, elle n’existerait pas.








