
Entreprendre pour Apprendre : Dans la peau d’un mini-entrepreneur
Il n’y a pas d’âge pour faire grandir son esprit entrepreneur. La preuve en a été donnée une nouvelle fois en mai dernier quand, à Dijon comme à Troyes, près de 500 jeunes ont présenté leur « mini-entreprise » dans le cadre du programme Entreprendre pour Apprendre. Une initiative pédagogique pour les élèves comme pour les professionnels « mentors », qui a vu une équipe dijonnaise se qualifier pour la finale nationale. Comment se sont-ils distingués ? Retour sur une aventure formatrice pour tous.
Dijon, Stade Gaston Gérard, mercredi 22 mai 2025.
Personne dans les tribunes, la pelouse est déserte et pourtant, il y a de l’excitation dans l’air. Au travers des vitres du premier étage, on distingue nettement une agitation inhabituelle pour un mercredi matin. L’impression se confirme après avoir franchi les portes vitrées. Là où se mêlent habituellement les supporters du DFCO et les invités des loges VIP se pressent aujourd’hui près de 500 jeunes : collégiens, lycéens ou élèves en apprentissage. Ils ont enfilé leurs tenues « professionnelles » ou leur t-shirt floqué pour venir présenter leur mini-entreprise, un projet qui les aura accompagnés tout au long de l’année scolaire et leur aura permis de tester les prémices d’une vie professionnelle.
Des stands créatifs pour convaincre un jury de professionnels
Pour espérer décrocher une place en finale nationale, le 12 juin à Paris, chaque mini-entreprise a imaginé un stand pour présenter le produit ou le service conçu, développé et, pour les plus aboutis, vendu sur place. Certains ont joué la carte du professionnalisme minimaliste pour leur stand, d’autres ont mis en scène leur proposition avec des décors faits maison et des accroches originales. Le long de l’allée, on s’arrête à l’Atelier des 13 mains, le stand des élèves de terminale CAP « Décoration sur céramique » du lycée Henri Moisan de Longchamp (Côte-d’Or). Nappe blanche, petites étagères en bois, branches artificielles de cerisier en fleurs : l’ambiance japonisante accompagne les bols à ramen, mugs et tasses réalisés par les élèves créateurs de cette mini-entreprise. « Ils se sont vraiment mis dans la peau de petits entrepreneurs, jusqu’à créer un vrai produit, le vendre, et reverser une part à une association », explique Noémie Oudet, auditrice au Crédit Agricole et mentor de l’équipe. « Ce genre de projet, c’est l’occasion de renouer avec l’enseignement, un monde et un rôle qu’on oublie parfois dans le monde de l’entreprise. »

L’Atelier des 13 mains, le stand des élèves de terminale CAP « Décoration sur céramique » du lycée Henri Moisan de Longchamp (Côte-d’Or)

La classe de première du lycée Montchapet de Dijon a imaginé une gourde en plastique recyclé dotée de trois compartiments
Des mentors pour transmettre, conseiller et encourager
Si les mini-entreprises sont initiées par des enseignants volontaires et motivés pour engager leurs élèves dans un projet, Entreprendre pour Apprendre sollicite également les professionnels, afin d’apporter un contexte économique concret et réaliste au concept imaginé par les jeunes entrepreneurs. Comme neuf autres collaborateurs du Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne, Noémie a ainsi été sélectionnée pour participer à ce projet de mentorat. Employée de la caisse régionale depuis plus de 12 ans, elle a saisi cette opportunité de sortir de sa routine professionnelle et de renouer avec un rôle de transmission, en apportant son expertise en finance. « Notre rôle est d’apporter un œil extérieur, et dans mon cas, surtout sur la partie budget, le calcul des charges, le travail sur Excel. Mais nous sommes aussi là pour soutenir dans les moments de mou, de doute. »
« Ce qui est intéressant, c’est de leur donner une autre vision, moins scolaire », ajoute de son côté Yohan Buet, moniteur au Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne à Troyes. Lui aussi a pu accompagner plusieurs classes, des BTS et des classes professionnelles du Greta. Il était également présent à la journée de présentation pour l’Aube, le 15 mai. « C’est un test grandeur nature pour eux, ils font leur show devant des jurys composés des mentors et nous pitchent leur concept à la manière de l’émission télé Qui veut être mon associé ? » Un moment apprécié par le mentor. « Il y avait des idées simples, mais vraiment porteuses. »
Des idées originales et des projets solidaires
Comme celle de la classe de première du lycée Montchapet de Dijon : une gourde en plastique recyclé avec trois compartiments, dont un pour transporter des médicaments. Si leur prototype ne verra jamais le jour, le travail réalisé a été formateur pour les élèves. « Je les ai accompagnés sur cinq sessions, explique Frédéric Clément, également collaborateur du Crédit Agricole de Champagne. L’objectif était d’être à l’écoute et de leur donner une vision professionnelle de leur projet. J’en retire une expérience intéressante sur l’approche d’un groupe de lycéens plus ou moins intéressés par le projet, qu’il faut motiver individuellement mais aussi par le collectif. »
Dans la plupart des cas, les mini-entreprises ne durent qu’une année scolaire, mais cela n’empêche pas de beaux aboutissements. L’Atelier des 13 mains a su organiser une soirée événementielle au cinéma Le Darcy de Dijon, pour promouvoir l’association qu’elle soutient : Pour un sourire d’enfants. Celle-ci œuvre depuis plus de dix ans pour la scolarisation des enfants vivant dans des décharges au Bangladesh. Un projet pensé, abouti, des bénéfices reversés et un vrai investissement des élèves, autant d’arguments qui ont su toucher les membres du jury. Les élèves accompagnés par Noémie ont décroché le prix de la meilleure campagne de communication et, surtout, le prix de la meilleure mini-entreprise pour la région Bourgogne-Franche-Comté. Ils sont donc partis à Paris pour tenter de remporter la finale nationale, le 12 juin dernier.
Une aventure humaine, tout simplement
Mais tous les parcours ne se ressemblent pas. À l’image du monde du travail, les mini-entreprises rencontrent des écueils que toutes ne peuvent pas surmonter. La jeunesse des élèves, leur motivation et la faisabilité du projet sont autant de facteurs qui peuvent freiner son développement. Édouard Maman a accompagné une classe de 5e du collège Pierre Brossolette à La Chapelle-Saint-Luc. Ce collaborateur les a conseillés sur leur projet, qui visait à produire et vendre des objets, notamment des enceintes Bluetooth réalisées avec d’anciens téléphones, les bénéfices étant reversés au foyer socio-éducatif de l’établissement. « Mais je pense que j’aurais été plus utile à un public plus âgé. Heureusement, le projet va continuer et sera peut-être plus abouti l’année prochaine. »
Pour autant, Édouard n’a pas de regret, tant l’expérience de jury a été enrichissante. « Le jour des présentations, j’ai découvert beaucoup de projets qui avaient du sens, et où une banque mutualiste comme la nôtre avait toute sa place. » Car pour les professionnels présents, il s’agit aussi d’échanger entre eux. « Nous ne sommes pas là pour faire la pub de l’entreprise, mais on peut se servir de ces expériences pour créer des ponts avec le public », ajoute Yohan Buet. Enrichissante pour les élèves comme pour leurs mentors, l’aventure Entreprendre pour Apprendre reprendra l’année prochaine pour une nouvelle année scolaire, avec de nouvelles idées surprenantes à découvrir et à accompagner.












